De fil en aiguille, j’ai commencé à m’occuper de la gestion des ordinateurs arrivant au labo en test puis à réaliser moi-même ces tests. C’est ainsi que j’ai commencé à écrire dans le journal.
Bruno Ferret
En ce qui concerne l’ordinateur personnel, je ne me souviens pas si j’ai eu mon premier avant ou après cet article. Il me semble que c’était un peu avant. Je crois que j’ai eu un ordinateur (dont je ne me souviens pas de la marque) avant d’avoir un Amstrad – le test m’avait convaincu !
Pour nous, il était évident qu’il allait bien se vendre. De là à prévoir le « carton » qu’il a réalisé…
En fait, je me souviens surtout qu’il s’agissait de mon deuxième article et que, si le premier était plutôt bon, celui-là m’a valu quelques « coups de pied au cul » totalement justifiés de la part de mon rédacteur en chef adjoint. La méthode était rude, mais elle m’a appris la rigueur qui me manquait alors. J’en suis reconnaissant à Petros. Et elle a permis de publier un article sur les MSX de bien meilleure qualité que ce que j’avais réalisé dans un premier temps, c’était le principal…
Et, bien sûr, les conférences et voyages de presse permettaient de rencontrer les confrères des autres rédactions. Tout le monde se connaissait, il y avait des « personnages » étonnants, cela donnait parfois des moments assez épiques.
J’ai participé à tous les numéros du journal, étant quasi-permanent avec le rédacteur en chef, Philippe Martin. Je me souviens de quelques nuits de bouclage (l’organisation manquait peut-être un peu de rigueur…) assez délirantes, à faire des tests de jeux à 2 heures du matin.
Le contenu du journal était sérieux sur le fond mais nous nous lâchions pas mal sur la forme, n’hésitant pas sur les jeux de mots. Et le magazine était très ouvert. Roland C. Wagner, dont je parlais plus haut, s’est lui aussi retrouvé à tester des jeux et à écrire des articles, alors qu’il était écrivain de science-fiction (il est malheureusement décédé en 2012).
En fait, le patron, Gérard Ceccaldi, a fermé Shift Editions (le nom de l’éditeur d’AmstradHebdo et d’Hebdogiciel) du jour au lendemain. Parce qu’il « en avait ras le bol » selon ce qu’il a déclaré plus tard dans une interview. Où il explique également : « on est parti la queue entre les jambes. On ne pouvait pas arrêter noblement… » On peut dire que c’est un parfait résumé de ce qu’il s’est passé.
En outre, à l’époque, le milieu était beaucoup moins formaté que par la suite. Tout un chacun pouvait plus ou moins s’improviser éditeur du jour au lendemain, ou journaliste. Tout le monde apprenait sur le tas, ou presque. Par exemple, à SVM, il y avait Petros Gondicas qui avait une formation de journaliste, comme Yann Garrett ou Hervé Kempf. Mais ils n’étaient pas très techniciens (ils ont évidemment bien progressé par la suite), au contraire d’un Seymour Dinnematin, qui venait de l’informatique et était un puits de science dans le domaine mais n’était pas journaliste à la base. Tous ces profils se complétaient, tout le monde progressait au contact des autres. Et c’étaient des « figures » assez remarquables.
Du côté des fournisseurs (d’ordinateurs, de logiciels, de périphériques…), c’était tout aussi « fantasque », il y avait de véritables personnalités excentriques, des personnes qui faisaient de l’informatique à côté d’autres activités (j’ai le souvenir ému d’un éditeur qui, sur un salon, m’a fait déguster son petit vin blanc et les huîtres de son beau-frère sur son stand, un grand moment !).
Tout n’était pas toujours sérieux, c’était même parfois assez bordélique, chez les uns comme chez les autres. Mais ça vivait, ça évoluait à une vitesse foudroyante. Je n’ai pas l’impression que nous avions le sentiment de vivre une période « historique » (les débuts de l’informatique grand-public), mais nous surfions sur cette vague, nous étions acteurs d’une période incroyablement vivace, créative.
Et comme bien peu se prenaient au sérieux (ce qui n’empêchait pas de l’être dans le travail, à SVM…), nous nous amusions beaucoup. Et il y avait toujours une grande excitation à voir arriver des nouveautés. À cette époque, tout un pan de la technologie pouvait s’effondrer par le biais de l’arrivée d’une nouvelle technologie bouleversant radicalement la donne. Et beaucoup de choses semblaient « extraordinaires », d’autant que l’on voyait également poindre les prémices d’autres grandes révolutions, comme le téléphone portable ou Internet (sous des formes moins développées, mais l’idée de base était là). C’est aussi ce qui a sans doute fait que les périodes suivantes ont eu moins de saveur : le marché s’est formaté, les grandes « révolutions » ressemblaient plus aux yeux de ceux qui avaient vécu les périodes précédentes à de « simples » évolutions, tout cet univers est un peu « entré dans le moule ».
Ce n’est pas pour dire « c’était mieux avant », simplement pour constater que l’on est passé d’une « ère des pionniers » (en exagérant un peu) à un « business » parmi d’autres.
J’ai ainsi eu un interlocuteur ne comprenant pas pourquoi, après avoir allumé écran et ordinateur, rien ne s’affichait sur le premier. Après « enquête » approfondie, il s’est avéré que le brave homme n’avait tout simplement pas raccordé les deux équipements… Une autre fois, un monsieur râlait parce que son ordinateur 16 couleurs (un must à l’époque, si si) n’affichait que des images en noir et blanc. Cela peut sembler bizarre, mais il m’a fallu un bon moment pour comprendre qu’il avait acquis un moniteur… monochrome !
Mais il est vrai qu’aujourd’hui, je ne vois plus vraiment personne de cette époque. J’ai plusieurs amis du monde de la presse, mais de périodes un peu plus récentes.
Je reste persuadé qu’il y a la possibilité de réaliser des magazines qui intéressent les lecteurs, qui se vendent, qui soient rentables. Mais cela implique de réfléchir à la manière de les positionner et de les faire connaître dans l’univers actuel. Il peut y avoir des choses très intéressantes à faire, à mon avis.
Cela étant, je trouve cela bien que des personnes, et j’imagine parfois trop jeunes pour avoir connu ces époques de leur vivant, s’intéressent toujours à ces « vieilleries » et assurent leur mémoire. C’est important de garder une trace de ce passé, de montrer la qualité de ce qui se faisait à l’époque. Parce que, même si les moyens techniques étaient bien moindres qu’aujourd’hui, il y avait parfois un très haut niveau de qualité dans la créativité et la réalisation.
Une bien belle et précieuse interview
cvbcvbcvb
cvbcvbcvb
cvbcvb
Commentaire 2 cvbcvb