iXien est le webmaster du site Homebrew Amstrad Today (AT pour les intimes). Ce site est tout récent et fait preuve d’un joli design et de critiques pertinentes. Le fait d’ouvrir également un nouveau site Amstrad -alors que le CPC date de 30 ans désormais !- m’a interpelé.
Il fait partie de la team Easter Egg, une team qui a fait sensation en 2012 un peu partout sur la scène rétro-gaming, à propos de la sortie du remake de R-Type sur notre plateforme préférée. Tout cela m’a donné envie d’interviewer ce CPCiste qui contribue à faire vivre (et de belle manière) la scène CPC.
Voyons ce qui pourrait avoir de l’intérêt. J’ai 36 ans, je vis sur Lyon et je travaille dans le secteur de la formation. Je suis passionné d’informatique et de jeux vidéo depuis mon plus jeune âge, ce qui explique un parcours semé de micro-ordinateurs et non de consoles.
Ma première machine fut un TRS-80 MC-10 sur lequel je jouais à des programmes très simples tapés par mon frangin. J’ai ensuite migré sur MO5 où j’ai pu découvrir mes premiers jeux commerciaux : Sortilège, Mandragore… puis vint en 1987 un CPC 6128 qui m’accompagna pendant 6 ans. Six années inoubliables qui me firent découvrir que j’avais bien plus en main qu’une machine à jouer. Toutefois, c’est ensuite sur AMIGA que je me suis pleinement exprimé en composant de la musique sous tracker, une machine surpuissante en la matière comme en bien d’autres.
Si la vie m’a ensuite rattrapée, je ne me suis jamais vraiment éloigné de mes amours de jeunesse. Aujourd’hui, bien que vivant en couple depuis de nombreuses années, je m’apprête à me marier et je suis père d’un petit bonhomme qui vient de fêter ses 14 mois. Cela ne m’empêche pas d’être un collectionneur invétéré de jeux sur de nombreux supports consoles et ordi que j’ai en ma possession. Ma passion de l’AMIGA s’est déplacée vers un classieux CDTV boosté qui me permet en toute discrétion d’assouvir ma passion pour le rétro gaming sur cette fabuleuse machine.
Et bien sûr, j’ai toujours un CPC 6128 sous la main. Je n’imagine pas un instant pouvoir m’en séparer !
Collectionneur devant l’éternel, cela me chagrinait aussi que la plupart de ces jeux ne disposent pas d’un emballage les mettant en valeur. Il fallut quelques années pour que je me lance avec un concept clair : animer un site mettant en lumière les productions amateurs passées et présentes sur CPC tout en leur offrant un packaging facile à reproduire pour quiconque souhaite mettre en boîte ses préférées.
J’ai longtemps été un utilisateur passif. Je n’avais que 9 ans quand le CPC est entré dans ma vie, donc les souvenirs qui ont forgé ma passion pour cette machine sont ceux d’un joueur émerveillé par des titres tels que Bomb Jack, Arkanoid, Jet Set Willy ou Gauntlet. La seule application qui trouvait grâce à mes yeux était Discology. Puis vint l’âge de la maturité. En 1990, je continuais tranquillement mon bonhomme de chemin avec mon CPC chéri. Rick Dangerous 1 et 2, Batman The Movie, Rainbow Islands, Prince of Persia, Lode Runner, voilà juste un échantillon de titres dont la version CPC supportait à mes yeux la comparaison avec celles sur 16bits, autant de jeux qui m’ont tenu en haleine jusqu’à ce que je puisse m’offrir mon A600 en 1992.
Pour cela, il fallut toutefois que je revende mon CPC. Fin du premier acte sans avoir vu tourner la moindre démo ou joué à autre chose que des jeux commerciaux sur la machine de SUGAR. En 1998, l’euphorie AMIGA s’est un peu estompée. Un peu seulement, puisque j’ai toujours un A1200 survitaminé. J’ai aussi un PC sur lequel les émulateurs se sont développés et je tombe au hasard d’une démopartie sur une archive pleine de DSK contenant des tonnes de jeux CPC que je redécouvre avec gloutonnerie. Là, je retombe dans la marmite, j’épluche les petites annonces locales et un CPC entre de nouveau dans ma vie. Je commence par récupérer des disquettes 3’ pleines de jeux à utiliser “en vrai”. Mais cela ne me suffit plus. Mon passé dans la démoscène AMIGA me pousse à rattraper le temps perdu. Je branche alors sur mon CPC un lecteur de disquettes 3’1/2. J’écris sous MS-DOS des tonnes de disquettes et je m’offre au tournant du siècle une orgie de démos, slideshows, musicdisks et jeux inconnus.
C’était un peu comme si retourner dans la maison de mon enfance m’avait permis de découvrir que j’avais grandi sans le savoir dans un paradis perdu. C’est à partir de ce moment-là que j’ai vraiment souhaité m’inscrire dans une démarche créative sur CPC. Mieux vaut tard que jamais, non ?
L’AMIGA est une machine extraordinaire qui a su marquer son temps par des capacités techniques avant-gardistes. Les possibilités offertes semblaient alors infinies et les développeurs ont multiplié ruses et astuces pour repousser les limites techniques du hardware. Même si cela s’est souvent fait au détriment du gameplay, certains jeux ont su mettre à genoux la machine avec un résultat visuel et sonore inespéré. Mais en contrepartie, il reste peu de challenge pour les développeurs actuels qui savent pertinemment qu’il sera difficile de surprendre. Sur AMIGA, on a l’impression que tout a déjà été fait, qu’il ne reste aucune terre inconnue à explorer.
De son côté, le CPC a été développé dans un but purement commercial et c’est naturellement ainsi que les développeurs de jeux de l’époque l’ont utilisé. Mais les ingénieurs qui l’ont conçu n’ont pas bâclé le travail pour autant. C’est une machine aux capacités équilibrées et qui offre une liberté de création assez inédite dans les années 80. C’est un fantastique bac à sable qui a été sous-exploité. Il reste donc énormément à découvrir et certains titres diffusés récemment montrent son réel potentiel. C’est particulièrement motivant.
Le contenu est gargantuesque, TotO a réalisé un travail exceptionnel à partir des graphismes de l’arcade et Fano a juste explosé les limites théoriques de la machine. Pour ma part, je suis assez mal placé pour porter un jugement sur mon propre travail. En tout cas, cela a été fabuleux de travailler sur des compositions aussi mythiques. En plus, je me suis offert le luxe d’utiliser mon CPC avec l’excellent tracker StarkOS. Je ne me remets toujours pas des sensations éprouvées durant cette période. Moi qui voulais rompre avec cette impression de passivité, j’ai été servi.
Attention, je n’ai rien contre le cross-développement qui consiste à utiliser une machine moderne pour concevoir un jeu homebrew. R-Type n’aurait jamais vu le jour sans cela. Mais bon, puisque je pouvais disposer d’un outil suffisamment ergonomique pour ne pas me faire regretter l’utilisation d’une application sous Windows, je n’allais pas bouder mon plaisir. À part cela, Kukulcan m’a demandé il y a quelque temps de concevoir la cover de son nouveau jeu, SUPERPIX. J’ai aussi pu participer aux dernières phases de tests avant le lancement, une brève expérience qui m’a rappelé combien il est grisant de s’inscrire dans le développement d’un jeu. J’ai quelques projets dans les tuyaux et on va me retrouver aux crédits de plusieurs jeux oldschool dont je vais signer la bande son. Cela ne se passera pas sur CPC, mais je compte bien revenir sur ma machine fétiche à l’avenir.
Le site est codé en HTML sous UltraEdit, un excellent éditeur de texte ASCII qui m’offre tout le confort nécessaire. Les éléments graphiques sont conçus à l’aide de Paint Shop Pro, un outil correspondant bien mieux à mes maigres besoins qu’une usine telle que Photoshop. Je l’utilise aussi pour la création des covers des jeux. Toute la partie textuelle des covers ainsi que les derniers éléments graphiques tels que les titres et logos sont ensuite ajoutés en utilisant de simples trames sous Office.
Je convertis ensuite le tout en PDF pour proposer à mes lecteurs des fichiers prêts à imprimer. Pour tester les jeux, j’utilise bien sûr mon fidèle CPC acquis en 1998 et qui ne me quitte plus. Mais bien sûr, pour effectuer des captures d’écran ou décortiquer certains jeux, je dois passer par l’émulation. Caprice32 a ma préférence, car c’est lui qui malmène le moins les programmes émulés avec au passage un rendu sonore bien meilleur que WinApe, un vrai cancre en la matière.
La scène CPC est assez restreinte, mais elle est éclatée géographiquement et très productive. Il y a une forte dominante française, anglaise et espagnole, pays dans lesquels le CPC a rencontré un énorme succès. Quoi qu’il en soit, des jeux et des démos des quatre coins du globe voient régulièrement le jour. Une richesse précieuse.
La scène CPC française tient un rôle important et elle propose certains des sites parmi les plus fréquentés. Elle a aussi offert de nombreux moments de bravoure à notre machine préférée ces dix dernières années. Le seul bémol à cet élan créatif international, c’est la présence de certains freins étonnants. Anglais et espagnols vouent un culte sans limites au seul CPC464 qui fut le modèle le plus largement diffusé dans leur pays respectif. Du coup, peu de leurs productions tirent parti des capacités supplémentaires du 6128 si répandu en France. Les espagnols, tout comme certains français, semblent aussi être fâchés avec la langue anglaise dont l’utilisation devrait être une évidence dans une communauté aussi dispersée. Mais ce qui est le plus flagrant, c’est le manque de persévérance dans le développement. Peu de productions supposant une longue phase de gestation voient finalement le jour et la plupart deviennent ce qu’on appelle communément des vaporwares. L’existence même de ce terme en dit long sur la question. Cela explique certainement la rareté des jeux et démos au contenu conséquent, noyés sous une masse de productions moins ambitieuses et à la durée de vie très courte.
Certains développeurs vont forcément tiquer sur cette dernière remarque en remettant à juste titre en question la volonté des joueurs à passer du temps sur un jeu nécessitant un long investissement sur un CPC. Homebrew.AT a justement pour vocation de donner à ces derniers l’envie de consacrer à chaque jeu le temps que son contenu mérite. Dans tous les cas, le CPC reste l’une des machines rétro parmi les plus productives et c’est vraiment intéressant de participer à la vie de cette communauté constituée de gens vraiment passionnés.
L’avenir du CPC repose sur un petit groupe de fans qui tient la vie de sa machine préférée à bout de bras. Malgré tout le succès qu’il a rencontré auprès du grand public dans les années 80, impossible de nier qu’il ne représente plus rien dans l’esprit des nouvelles générations de créateurs et de joueurs ayant grandi au contact de machines plus récentes.
Le CPC appartient à l’histoire et notre rôle, selon moi, est de lui assurer une place durable dans les étoiles. Gavée de son vivant de conversions de jeux créés sur d’autres supports, peu de productions exclusives poussent aujourd’hui un jeune joueur, même passionné de Play histoire, à explorer les arcanes du CPC. Depuis quelques années, ce sont les fans qui ont su montrer par leur passion et leur créativité que la machine phare d’AMSTRAD n’avait pas été un simple outil commercial, mais bien un moteur de la démocratisation du jeu vidéo en Europe, fidèle compagnon de toute une génération de joueurs et de programmeurs aux yeux brillants de mille rêves.
Ne lâchez rien les gars !
Grâce à vous, le CPC montre aujourd’hui toute son importance dans les 30 dernières années d’histoire vidéo-ludique. Et si un jour, il ne doit plus rester qu’une poignée d’illuminés gardant un CPC allumé dans la nuit, alors j’en serais, ventrebleu !
Je te remercie d’avoir répondu à mes questions et je te souhaite encore de belles productions que ce soit sur le net ou sur CPC.
Une bien belle et précieuse interview
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