Pouvez-vous nous rappeler les softs que vous avez réalisés (seul ou en compagnie de vos compères Ludovic et le sieur Hemonic) ?
Lorsque nous sommes allés voir ERE informatique avec SRAM, ils nous ont accueillis à bras ouvert. Cela faisait des semaines qu’ils cherchaient un jeu de ce type qui manquait à leur catalogue. Et nous leur apportions sur un plateau un jeu terminé, il ne restait plus qu’à y mettre la musique et cette « cochonnerie » de protection anti-pirate imposée par l’éditeur et qui ne servait à rien. C’est Philippe ULRICH (directeur de collection) qui nous a fait la musique.
Vous le savez sans doute, il n’y avait rien à part le basic Amstrad et l’assembleur. C’est Ludovic qui a créé tous les outils servant à la création « interne » du jeu. Il a commencé par faire un outil pour dessiner avec la taille qu’il nous fallait, les palettes de couleurs. Puis le compresseur/décompresseur d’images (ça devait tenir sur une disquette de 2 fois 180Ko). Il a créé également l’outil pour fabriquer les sprites (mot que l’on n’entend plus aujourd’hui) et les routines assembleur pour les manipuler à partir du basic. Jacques, lui, faisait toute la programmation de l’intégration du jeu par rapport au scénario.
Il est également l’auteur de l’analyseur syntaxique qui a la particularité de toujours trouver une réponse quelle que soit la question. Et si la même question était posée trois fois de suite, la réponse était différente. En effet, 3 dictionnaires tournaient pour assurer une plus grande variété de réponses. Et le tout compliqué par les traductions en anglais et en allemand qui étaient présentes sur la disquette. Une particularité pour remplir les disquettes « comme un &_#339;uf », nous ne passions pas par le système d’exploitation pour lire et écrire. Nous écrivions « en dur » octet par octet sur les secteurs. Moi, j’étais chargé de créer les scénarios et les graphismes que je mettais en forme grâce aux outils de Ludovic.
Dans SRAM 1 et 2, comment le graphiste créait-il les images des lieux et comment étaient-elles compressées ? “Autrement dit, la question est :”Le graphiste utilisait-il un mini utilitaire de dessin vectoriel (fastidieux) ou faisait-il le dessin en bitmap pur et un algorithme puissant chargeait ensuite de le vectoriser (facile pour le graphiste) ?”
J’ai déjà partiellement répondu à cette question. Notre secret résidait dans la puissance des outils de Ludovic. Sram et Sram 2 utilisaient des coordonnées vectorielles. Pour Sram 1, je faisais tout « à main lavée » sur l’écran. Pour Sram2, on avait amélioré en « scannant ». À cette époque, je dessinais sur papier les grandes lignes du dessin en noir et blanc. Puis, je mettais le papier dans une imprimante Amstrad équipée d’une cellule photo électrique qui balayait le dessin et récupérait les pixels en noir et blanc.
L’outil de Ludovic récupérait cette esquisse qui devenait un fond sur lequel je tirais mes vecteurs dans les couleurs de mon choix. Une fois les vecteurs terminés, je remplissais avec des couleurs qui pouvaient être des trames très complexes… Pour Qin, tout était en bitmap. Ludovic avait créé un algorithme qui faisait d’abord un passage horizontal, puis un passage vertical, et il retenait l’image la plus petite, c’est pour ça que certains écrans s’affichent en rideau de haut en bas, et d’autres de droite à gauche. Chaque octet comptait ! Ludovic a découvert plus tard que c’était le même principe utilisé pour le format GIF, Il a donc réinventé la roue ou peut-être GIF est arrivé après ?? (Voir la copie d’une des esquisses de QIN).
Avez-vous toujours des contacts avec Jacques Hémonic et que devient le fiston Ludovic ?
Jacques travaille dans une société d’informatique plutôt axée sur la DAO professionnelle. Ludovic, après son diplôme d’ingénieur, a été embauché comme développeur chez Microsoft à Redmond (près de Seattle). Il y est depuis 10 ans et est devenu « Développement Manager » sur MS Project. Il dirige une équipe de 45 ingénieurs développeurs. Il a maintenant 34 ans et 2 enfants. L’autre fiston Nicolas (Salocin) était beaucoup plus jeune, mais ses idées étaient les bienvenues, et puis il débuggait ! Après un diplôme d’ingénieur à Centrale, il est parti vivre et travailler à Londres comme consultant international pour PeopleSoft.
À cette époque, Jacques et moi étions salariés dans la même entreprise, Ludovic faisait ses études. L’enthousiasme de notre équipe a été échaudé par le piratage forcené de cette époque. Ce piratage, à mon avis, a tué beaucoup de talents français. Huit jours après sa mise sur le marché, nos jeux étaient déjà craqués et diffusés dans les réseaux de pirates (il n’y avait pas internet, mais ça allait très vite). Autre raison, ERE avait déposé le bilan au moment où QIN montait en puissance. C’est sûrement pour cela qu’il est moins connu.
Que pensez-vous de cet engouement pour le CPC 20 ans après, des sites de fans, de l’abandonware ?
Je pense que cela fait du bien de voir que des personnes enthousiastes continuent de faire vivre cette informatique. Cela me parait sain que l’on rende hommage aux pionniers aussi bien coté matériel que logiciel de cette informatique qui a faits celle d’aujourd’hui.
L’idée de départ, le scénario de SRAM, est-ce un processus qui a été long ou est-ce venu tout seul ?
Dans les Sram, on rencontre Cinomeh, qui est Hemonic à l’envers. De même Egres et Edualc sont Serge et Claude. Mais alors… qui est Claude ? Claude, c’est ma femme. Elle a bien mérité cet honneur vu le temps que nous passions sur les jeux (à son grand désespoir). Ne pas oublier les princes et la princesse (Civodul, Salocin et Eneleh) qui sont mes trois enfants.
Aussi, quel rapport entre la page de présentation de Sram et le jeu ? (on y voit une espèce de module, genre bout de vaisseau cassé) ?
Aucun. C’est Michel RHO le graphiste génial de ERE qui a fantasmé là-dessus. Nous n’y avons trouvé rien à redire. J’en profite pour lui rendre hommage et lui adresser mes sincères salutations.
Quels étaient les outils de création graphique pour SRAM/QIN (vectoriel ? bitmap ?) et comment les “primitives” de dessin des écrans étaient-elles séquencées (manuellement où automatiquement d’après un algorithme) ? Quelles étaient ces primitives (simples “lignes droites” et “remplissages” ou d’autres types comme “arc-de-cercle”, “bézier”, etc. ?) Qui en faisait la création (certains écrans de QIN sont tout de même de toute beauté pour un système aussi primitif) ? “
Cela est expliqué plus haut. Je peux ajouter que Ludovic avait créé en assembleur un compresseur/décompresseur qui analysait le dessin et stockait le minimum d’informations pour le recréer. Le dessin était décompressé en mémoire, puis affiché, ce qui était très rapide.
Est-ce qu’il existe un story-board du jeu, sur papier, un plan, bref, des documents qui auraient survécu ?
Comme dans SRAM2, il y avait une gestion du temps qui passe… Après son bac, Ludovic avait décidé de prendre une année sabbatique. Je lui ai fait un scénario pour créer COLORIAGE pour l’occuper. COLORIAGE a été en test dans une école maternelle. Le succès qu’il y a rencontré nous a encouragé à le faire éditer chez CARRAZ. Je suis étonné qu’il y en ait eu en circulation, car CARRAZ a cessé toute activité peu de temps après nous avoir envoyé quelques exemplaires du jeu packagé. Nous n’avons jamais touché le moindre centime sur ce jeu.
Depuis votre contact, je passe régulièrement sur votre site. Il est très bien fait. Que de nostalgie. Merci encore à votre sympathique équipe. Je vous joins quelques petits cadeaux :- Storyboard.jpg qui est la première page du storyboard de QIN.- calque.jpg qui est un des calques que l’on faisait « lire » à l’imprimante pour faciliter les dessins. Et un petit bonus avec auteurs_ERE.jpg C’est une planche représentant les auteurs en vogue chez ERE à cette époque. Les caricatures sont de Michel RHO qui c’est lui-même caricaturé en se donnant un air effrayant alors qu’il est plutôt du genre jovial et sympathique.
Une bien belle et précieuse interview
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